Le Chef, c’est le Chef .... et que l’on ne glose pas sur le Chef.
C’est le centre de cet univers si particulier qu’est le choeur, celui vers lequel convergent tous les regards ou, en tous cas, vers lequel ils devraient TOUS converger. Il nous le demande bien assez souvent d’ailleurs et nombre d’entre nous dessinent consciencieusement des “lunettes” (O-O) et des” yeux” en quantité incalculable sur les endroits stratégiques des partitions. Le regarde-t-on pour autant?....
Si l’on est là, devant lui, chaque mardi soir, année après année, oeuvre latine après oeuvre italienne après oeuvre allemande, c’est qu’on l’aime bien , qu’on l’aime beaucoup et qu’on l’aime comme il est.... et l’on n’ en veut rien changer!
Pour avoir un petit aperçu de sa personnalité, voici un florilège des remarques, commentaires et autres observations, des remontrances et des reproches aussi, qui ont ponctué l’apprentissage des partitions au cours des dernières années: tout en finesse et en subtilités, parfois au-delà des mots , le regard et le sourire en coin donnent la note à ceux qui ont pris le soin de lever la tête au bon moment!
Hormis toutes les nuances classiques, Forte, piano, pianissimo... Le Chef nous gratifie de ‘distinguos’ plus subtils comme: “Suracticulé, sur des semelles de crêpe”
“A fond les ballons!” pour les Forte
“TTTeuTon “ Dans le Stabat Mater de Schubert.
“ Faites-moi peur!” ou “TeRRRRRRificante” dans le Coro N°7 du Lauda Sion de Mendelssohn
D’autres encore :
“Lourd : On doit presque sentir l’encens!” ...puis “séraphique” dans le Coro n°5 du Lauda Sion .
“Ici, il faut arriver comme CA!” avec les bras écartés pour marquer un Forte du Requiem de Fauré , l’équivalent de “Enoooorme!”
la référence suprême, ce sont les Tables de la Loi du Grand Temple que nous devons imaginer et sur lesquelles nous nous devons de projeter toute la puissance de nos voix dans les Fortissimi Maximi.
Toujours à la recherche de la note juste, du rythme juste, de la nuance juste et la parole juste, nous avons eu droit parfois à:
“Évitez les ‘déguelando’! “ avec l’onomatopée , la grimace et le geste de la main qui vont avec.
“On n’est pas dans une chorale paroissiale “au moment du “Laudamus te” dans le Gloria de la Missa Sancti Nicolaï de Haydn -
“Évitez l’effet locomotive qui démarre!” pour le “ Questo asilo” de l’Orfeo de Gluck et, cette année, pour le Benedictus du Requiem de Mozart.
“après chaque “ A “ , il y a un “men” ou dans une autre version:” En latin, il y a souvent un “men” “.
“Ce n’est pas un canon! “ dans le Requiem Aeternam de Haydn (Requiem Solemne)
ou encore:
“On ne s’écoute pas chanter, on avance!”
une autre fois :
“Chacun doit être persuadé que ce qu’il dit est le plus important du discours” au moment du Credo de la Missa Sancti Nicolaï de Haydn.
Pour ce qui est des remarques , chaque pupitre a droit aux siennes:
A tous :
“ Nous sommes tous très bons en natation!” le 26 Novembre 2002 lors de la traversée du Stabat Mater de Schubert
“Il faut savoir s’arrêter tant qu’il est encore temps!” à la fin du coro 5 du même Stabat Mater .
Le requiem de Fauré nous a valu de gentils:
“...on se rapproche de la vérité!”
“la même chose .....mais en chantant!”
“C’est ce que l’on entend souvent, ce n’est pas ce qu’il faut entendre! “ pour l’offertoire.
Cette année au début de l’ Hostias du Requiem de Mozart , nous avons eu ce compliment :“ Pas mal!... Il manque presque tout ...mais c’est bien!” , un autre jour “ L’essentiel y est! ”ou encore au moment du Lacrimosa : “ Il y en a qui vivent leur vie; Ils sont dans leur salle de bain!”
Un peu plus acide mais dans un même esprit pour l’Orfeo de Gluck : “Normalement, c’est splendide! “ a ponctué au début Janvier 2006 notre prestation du choeur des furies.
Quant au Requiem Solemne de Haydn :
“ C’est la même version.... sans les trous!”
“ Il y a une vie après le requiem” dans l’Agnus Dei
dans la nuance supérieure :
“ C’est dramatique mais pas tragique!” pour le “ne absorbat” du Domine.
“Il y a de bons moments ..... très brefs !” dans le Dies Irae
La courtoisie du chef fait que les remontrances vont plutôt vers les pupitres masculins .
A tous les hommes:
“Je ne peux pas vous dire que c’était faux... il n’y avait rien!” Dans la Missa Sancti Nicolaï de Haydn .
“ Là, ça commence à ressembler à ce que cela devrait être” dans la fugue finale du Requiem de Mozart
“ De l’obscurité, ....il y en a !” pour le “Ne absorbat du Requiem” , cette année.
Aux basses plus précisément:
“ c’est bien.... dans l’esprit! “choeur des furies pour l’Orfeo de Gluck
“le rythme est bon... quelques paroles sont en place... quelques notes aussi!” pour le stabat Mater de Schubert dans le Coro 7.
Le gloria de la Missa Sancti Nicolaï de Haydn a valu aux ténors un :” Plus on avance, mieux , c’est..... Ce qui veut dire qu’au début, c’est pas terrible!”
Dans les années précédentes, dans le coro 7 du Stabat Mater de Schubert, ils avaient eu droit à :“ Ya de l’idée ! mais ... Il n’y a pas toujours du son “ ou “ Là, vous composez , les gars!” ou encore “ le temps se gâte à ‘54’”
Pour les dames, les Soprani ont été égratignées par un “ la perfection n’est pas de ce monde” lors d’une interprétation du Sanctus dans le Requiem solemne de Haydn et par l’évocation de “ coups de glotte” et d’“Amen “de petite dame pressée” pour le Requiem Solemne de Haydn.
Sinon l’ensemble des pupitres féminins a eu droit à un “ Merveilleux!” le 20 Février 2002, les Alti ont été gratifiées d’un pouce en l’air, accompagné du sourire qui va avec, le 12 novembre 2002 dans leur prestation du Coro 7 de Schubert. Le dernier “Vous êtes merveilleuses! “ date du 7 Janvier 2003... et ce jour-là, il avait neigé!
Enfin, lors de la dernière répétition avec piano, le Chef nous a gratifiés d’un “Très bien ! Super! “ à la fin de la fugue du Kyrie du Requiem de Mozart.
Je parlais précédemment du regard et du sourire en coin qui ponctuent les paroles du chef. En voici une illustration:
A la Fin du Coro N°2, dans le Lauda Sion de Mendelssohn au moment du Crescendo qui doit tendre vers le Forte, sans toutefois l’atteindre , le chef s’époumone:
“ Encore!... Encore!” . Vous n’allez pas me faire crier ‘ Encore!... Encore!... Encore!’ toute la soirée!”
Le propos était anodin.... mais au-delà du propos, l’oeil et le sourire , coquins.
Ne l’ont vu que ceux qui le regardaient!....